Deux femmes: Un même combat pour les jeunes élues

Zaineb Mannai, 28 ans, vient de la région de Bou Arada (Siliana). Sondes Jemai, 35 ans, quant à elle, est originaire de Aîn Draham (Jendouba). Ces deux jeunes femmes ont en commun un point: elles se battent pour que les femmes tunisiennes des régions prennent une place plus grande dans leur communauté.
Leur histoire
Zaineb a choisit de s’impliquer en politique pour aider les femmes de sa communauté. Malgré le fait qu’elle ait décidé de faire le grand saut au sein du Courant démocrate au début de 2018, elle occupe aujourd’hui le poste de présidente de la Commission des affaires sociales. Si elle a attendu aussi longtemps avant de s’impliquer en politique c’est qu’elle se sentait retenue par les gens autour d’elle. Mais elle affirme que la flamme est en elle depuis très longtemps déjà; on sent d’ailleurs la détermination qui l’habite. Dans cinq ans, Zaineb se voit occuper un poste à l’Assemblée des représentants du peuple. De plus, la jeune femme apprend à prendre de plus en plus confiance en elle et à faire entendre sa voix. Elle souhaite par ailleurs être un modèle pour les femmes des régions et les encourager à prendre leur place. Elle croit fermement que « les femmes peuvent se libérer, défendre leurs principes, leurs idées et leur pays. »
« Avant, je n’avais pas ce courage. Même si j’avais des idées et des opinions, je ne les partageais pas avec les autres. Mais avec l’Académie politique des femmes d’Aswat Nissa, j’ai vu les filles qui défendaient leurs principes et qui veulent faire passer leurs messages. Petit à petit, j’ai commencé à suivre leur exemple. Petit à petit j’ai construit ma personnalité, ce n’est pas facile. »
 -Zaineb
De son côté, Sondes a intégré la scène politique il y a maintenant cinq ans. De fil en aiguille, elle a passé de membre du bureau local de Nidaa Tounes à secrétaire générale, puis formatrice pour les femmes de sa région. Pour la jeune femme, c’est également l’envie d’aider sa communauté qui l’a poussée à faire ses débuts en politique. Surtout d’aider les femmes de sa communauté qui, selon elle, possèdent un potentiel énorme. La jeune élue veut montrer l’exemple : elle croit que c’est en démontrant qu’il est possible de faire bouger les choses et que les femmes sont tout aussi capables d’y arriver qu’un réel changement va se produire. Selon elle, les femmes doivent prendre conscience qu’elles ont des droits et elles doivent recevoir les outils nécessaires pour mener cette lutte.
Les défis des femmes des régions
L’un des plus grands obstacles, affirme les nouvelles élues, est que les hommes ne souhaitent pas partager le pouvoir, particulièrement dans les zones rurales : les femmes restent alors à l’écart alors qu’elles ont tout ce potentiel en elles.
Zaineb a comme projet d’offrir des formations aux femmes de sa région afin de leur transmettre ce courage et cette force de prendre la place qui leur revient de droit. « Car les conditions dans lesquelles elles vivent sont différentes de celles dans lesquelles vivent les filles de la ville. Un contrôle plus grand de la part de leur entourage est exercé sur elles et ça demande donc plus de temps et d’effort pour les filles de région de pouvoir prendre leur place. » Elle pense aussi à des projets plus concrets qui donneraient aux femmes les capacités financières de s’imposer et d’avancer par elles-mêmes.
« Il faut qu’elles fassent un travail sur elles-mêmes, qu’elles s’imposent, qu’elles se défendent et qu’elles défendent leur indépendance. » 
– Zaineb
Sondes, constatant les obstacles que doivent surmonter les femmes des zones plus éloignées pour faire entendre leur voix, se consacre aujourd’hui à offrir des formations aux femmes de sa région. Elle constate que l’un des problèmes étant que les femmes possèdent généralement moins de ressources financières et de contacts, et qu’elles sont par conséquent confinées chez elles. La simple question de transport peut devenir un enjeu affirme Sondes. « Des fois, elles peuvent venir assister aux formations, mais elles te disent qu’elles n’ont pas les moyens pour payer les frais de transport. » C’est pourquoi Sondes a décidé de n’offrir des formations qu’aux femmes de sa région afin qu’elles n’aient pas besoin de se déplacer. Ainsi, elle leur offre la possibilité de développer leurs compétences et leurs connaissances pour devenir des actrices de changement à l’échelle locale.
Un travail d’émancipation
Zaineb affirme que c’est par le biais de discussions que les choses changeront. Même si sa famille était réticente à son entrée en politique, elle leur a expliqué ses motivations et ses intentions. Cependant, elle souligne avoir reçu un grand support de la part de son oncle, fait important démontrant que les hommes peuvent être des alliés pour le combat des femmes en Tunisie. Aujourd’hui, non seulement les membres de sa famille sont-ils contents pour elle, mais ils la soutiennent et l’encouragent. Malgré qu’il reste encore beaucoup de travail à faire, Zaineb croit que la situation des femmes progresse énormément.
Sondes regrette toutefois qu’elle doive encore se buter aux mentalités qui relèguent les femmes aux positions inférieures. « Une femme libérée qui travaille, assiste à des formations et sort de chez elle est pointé du doigt. » Elle avoue qu’elle doit parfois s’effacer pour se faire un peu oublier. Parce que si trop d’attention est focalisée sur elle, elle se fera mettre des bâtons dans les roues pour la simple raison qu’elle est une femme. Mais la jeune femme reste optimiste puisqu’elle sait que les gens reviendront vers elle pour lui demander de venir assister ou donner un coup de main.
L’expérience des deux jeunes élues est extrêmement inspirante.
Le changement s’est d’abord se changer soi-même, prendre confiance en soi, en ses idées et en ses convictions.
Le changement s’est ensuite changer les gens autour de soi, leur faire comprendre que les femmes ont leur place et qu’elles doivent être reconnues comme égales et autant capables que les hommes.
Finalement, le changement s’est de changer sa communauté, de la transformer et d’offrir des outils, des moyens, des informations aux femmes des régions pour propager ce changement pour une Tunisie égalitaire.
« Par amour pour la Tunisie, on va continuer et on va prendre nos places en tant que femmes tunisiennes. »
 – Sondes